Pour le 2ème tour éliminatoire de la Coupe de France, le F.C. Sochaux rencontre le Cercle Athlétique Mulhousien.
Si cette équipe n’atteint pas la notoriété de sa rivale locale du F.C. Mulhouse, elle peut être néanmoins considérée comme une bonne équipe Alsacienne. Depuis le début de la saison, elle compte des victoires sur l’équipe du Red Star Strasbourg, 5 à 3, le S.C. Sélestat 1 à 0 et le F.C. Guebwiller 2 à 1.
La désignation du FC Sochaux comme adversaire du CA Mulhouse n’a pas été franchement appréciée en Alsace.
L’Express de Mulhouse
05 Octobre 1929
F. C. Sochaux C. A. Mulhouse.
Nous voyons-là tout d’abord un match «inégal», celui que le C. A. M. doit aller disputer à Sochaux, contre une équipe vedette de France à laquelle on sacrifie le jeune club qu’est le C. A. M. et qui depuis plusieurs années joue de malchance dans la Coupe de France. Les Camistes, il faut le dire ici, ont été «salés» par la Commission de la Coupe, où il ne doivent pas avoir de «bons amis».
Un déplacement à Sochaux n’est évidemment pas la mer à boire mais quand on songe aux moyens dont disposent les footballers de Sochaux et ceux du C. A. M…
Le F C Sochaux sort d’une défaite à Dusseldorf 4 à 1 face à une sélection des meilleurs joueurs de la ville. Au 1er Tour de la Coupe de France, le FCS a étrillé Pontarlier à Sochaux par 8 buts à 1.
Pour ce match, le FCS présentera son équipe de Coupe, privée des services de ses joueurs licenciés B et de quelques joueurs blessés le dimanche précédent à Dusseldorf. De plus, Robert DUFOUR a été écarté définitivement de l’équipe.
Lozes, le réputé gardien de but, occupera le poste d’avant centre, place qu’il a occupé pendant deux saisons en Espagne avec succès. Lowi le remplacera dans les buts.
Dans ces conditions, le résultat du match devrait être plus serré qu’il n’y paraissait.
Le match
Le 06 Octobre 1929, les 2 équipes se présentent dans les compositions suivantes:
FC Sochaux: Lowi ; Morrot, Degane ; Bregnard, Wartel, Varéchon; Ferrand, Boros, Lozes, Bailly et Besançon.
C.A Mulhouse: Furstenberger ; Schultzendorff I, Schultzendorff II; Grosser, Hofer, Polatzek; Schmitt, Nett, Ross, Barlement, Didierlaurent.
Le FC Sochaux joue en maillot jaune et le C.A Mulhouse en maillot rouge.
La rencontre débute à 14H30.
Le Sport Alsacien
07 Octobre 1929
Première mi-temps
Devant environ 600 personnes et avec un accueil animé, le match débute à 2h30 précises. Un vent fort souffle sur le terrain tout au long du jeu. CAM choisit le vent comme allié. Le coup d’envoi de Sochaux est immédiatement stoppé par Hofer, les attaques contre le but de Sochaux sont assez vives. A la 4ème minute, Grosser centre vers la gauche, DidierLaurent arrive et le premier but est obtenu d’une superbe tête dans la lucarne gauche.
Sochaux 0 C.A Mulhouse 1
CAM joue avec cran et extrêmement vite. Pendant ce temps, l’ailier droit de Sochaux s’enfuit et met la panique dans la défense du CAM. Lozes et Borros sont très actifs mais les frères Schultzendorf sont sur leurs gardes. Peu de temps après, c’est Grosser qui repasse au milieu. Ross arrive, contourne la défense et marque le deuxième but d’un tir violent dans le coin inférieur gauche.
Sochaux 0 C.A Mulhouse 2
Penalty contre Sochaux. Magnifiquement exécuté par Schultzendorf II, le tir est stoppé brillamment par le Hongrois Lowi avec un magnifique plongeon. Le vent souffle de plus en plus et amène une série de corners contre Sochaux, tous bien tirés devant le but, mais sans résultat. Un autre corner botté par Didierlaurent est bloqué par la défense Sochalienne. Diedierlaurent reçoit à nouveau le ballon et d’un tir explosif dans le coin supérieur gauche marque le 3ème but.
Sochaux 0 C.A Mulhouse 3
Sochaux a pressé fort pendant 10 minutes et Polatzek a sauvé un but sur la ligne. Immédiatement après, la mi-temps arrive.
Deuxième mi-temps
Dès le début de la 2ème mi-temps, Sochaux pousse, jouant avec le vent. Manifestement, Borros, Bally, Wartel et Lozes font preuve de classe par de belles passes à plat, combinées à des astuces inhérentes. Ils sont maîtres du dribbling et assez pointus dans le jeu. Pendant ce temps, C. A. M. fait des percées dangereuses. Didierlaurent se présente deux fois devant le but, et à chaque fois le génial Lowi se jette à ses pieds.
A la 60e minute, Ross reçoit le ballon au centre, contourne tout ce qui se présente à lui et marque le quatrième but d’un tir magnifique.
Sochaux 0 C.A Mulhouse 4
Attaque défense sur le but du CAM. 3 ballons dangereux de Boros ont raté de peu le cadre, le reste a été arrêté par Fürstenberger, actuellement en très grande forme. Le match s’est un peu calmé, les joueurs du CAM ont tout donné et au coup de sifflet final, le CAM a quitté le terrain en vainqueur mérité, applaudi vigoureusement par le public, éliminant ainsi le redouté FC Sochaux de la Compétition Nationale.
Sochaux joue un jeu de passes agréable et de bon niveau, ce qui n’est pas surprenant compte tenu de la classe de Borros, Lozes, Wartel et Bailly.
Avec CAM, nul besoin de mettre en avant un joueur en particulier. Tout le monde a joué avec enthousiasme, ce qui était certainement dû à l’adversaire le plus dangereux et nous a aidé à gagner. Une mention spéciale à l’arbitre, le lieutenant Colla, qui a mené le jeu correctement.
Considérations
L’Intransigeant
08 Octobre 1929
Le deuxième tour de la Coupe de France, avec ses 158 matches, a fourni peu de résultats inattendus. La grande surprise a été l’élimination du F.C. Sochaux qui, sur son propre terrain, a encaissé 4 buts à zéro de la part du C.A. Mulhouse.
Si l’on ne prévoyait pas un tel exploit du Cercle de Mulhouse, que le redoutable F.C.M. relègue d’ordinaire à l’arrière-plan, on n’était pas disposé non plus à enregistrer une mauvaise performance do Sochaux, dont l’équipe, nouvellement formée, avait fourni un début de saison tres brillant.
Y aurait-il déjà un ressort brisé dans le mécanisme du jeune club ? On parle d’impossibilités, de manque d’adaptation. aux mauvaises conditions atmosphériques. La vérité est qu’il y a des brebis galeuses dans le troupeau. Un dirigeant de Sochaux me disait, tout récemment, que Lozes et Dufour, à l’encontre de Boros et de leurs autres camarades, ne s’adaptaient pas à leur nouvelle situation et tendaient à considérer le football comme une occupation suffisante et exclusive de tout autre labeur. Le revers d’hier aura vraisemblablement pour effet d’épurer l’équipe.
Le voisin de Sochaux, Valentigney, ne possède pas, lui non plus, la bonne carburation. Une qualification difficile, par 3 A 2, aux dépens du modeste Montbéliard, prouve que l’A.S.V. n’a plus l’allant ni la foi d’il y a trois ans. Là aussi, la crise est plus morale que matérielle. Là aussi, des mesures radicales paraissent s’imposer.
Le Figaro
08 Octobre 1929
Le second tour de la Coupe de France a été disputé dimanche.
On note, à l’issue de ce second tour, une seule surprise digne d’être signalée. C’est la défaite du F. C. de Sochaux, battu par le C. A. Mulhouse.
Sochaux n’avait pas jusqu’à ces derniers mois une bien grande réputation sportive, mais à la période des mutations un certain nombre de joueurs notoires comme Lozes, Kenner, Dufour, Boros émigrèrent dans cette ré gion industrielle désireuse tout à coup de connaître la notoriété sportive.
Du premier coup ou presque ses espoirs sont à terre et désormais il lui faudra attendre l’an prochain pour se signaler à l’attention des foules sportives.
Comme quoi il ne suffit pas, pour connaitre le succès, de réunir sous une même bannière une multitude de joueurs réputés.
Si l’équipe n’a pas le « moral » élevé, si chaque joueur n’a pas le cœur bien accroché et l’amour bien avéré de ses couleurs, il n’y a pas de victoire possible.
Le F. C. Sochaux vient d’en faire la malheureuse expérience comme avant lui bien d’autres l’avaient faite.
L’Alsace de Belfort
09 Octobre 1929
A Sochaux, C. A. Mulhouse bat F.C. Sochaux, 4 à 0.
Comment? Une équipe promotionnaire d’Alsace, battue d’avance, a réussi ce coup de maître d’infliger une belle correction à un onze confectionné par le racolage des grandes vedettes de l’heure. Ça c’est fameux !
Il y a là de quoi tirer une belle leçon de chose. A quoi sert d’avoir tant d’as en réserve et même en action pour ne pas pouvoir seulement sauver l’honneur contre une modeste équipe ?
Le F.C.S. amputé de deux ou trois « amateurs » ne vaut-il pas mieux que nos équipes régionales? C’est à le croire. En tous cas, son élimination, si négligeable puisse-t-elle paraître à certains, n’en restera pas moins un point noir à son palmarès.
Mais c’est un point noir qui va briller comme une étoile dans le cœur des camistes. L.G.
L’Express de Mulhouse
09 Octobre 1929
Notre mot de la fin est pour le CAM.
Battre le FC Sochaux chez lui par 4 à 0, cela a constitué une véritable sensation.
Un correspondant franc-comtois d’un journal de Paris a essayé de ternir un peu la belle victoire du CAM en prétextant l’indisponibilité de joueurs, la pluie et la neige (oho!).
Admettons que quelques équipiers aient manqué, il reste pas moins vrai que le CAM est qualifié pour le prochain tour et Sochaux éliminé.
La Ligue d’Alsace, qui «n’a rien pu faire» jusqu’ici en faveur du CAM auprès de la commission de la Coupe de France pourra montrer cette fois-ci avant la désignation des adversaires ce dont elle est capable.
H. M.
L’Auto Vélo
09 Octobre 1929
Sochaux disparaît prématurément de l’épreuve nationale et ce fait sera considéré partout comme la surprise sensationnelle de la journée, ceci seulement pour ceux qui ignoraient dans quelles conditions l’équipe de Sochaux abordait la rencontre.
Par suite de blessures, les Francs-Comtois n’avaient pu aligner que trois de leurs titulaires de première équipe, soit: Lozes, Boros et Wartel, et si le onze était complété par de bons éléments locaux, il n’approchait que de très loin l’équipe victorieuse du C.A.P. à Buffalo. Ces circonstances connues, la défaite de Sochaux apparait tout à fait normale; toutefois, il semble, à première vue, que ce fut une faute de sortir Lozes de ses buts pour le placer à la ligne d’attaque.
L’Alsace de Belfort
10 Octobre 1929
Comment fut éliminé le FC Sochaux
L’élimination du FC Sochaux a fait grand bruit dans la région. C’était forcé. après le battage fait sur l’équipe de M. Bourgeois.
Cette équipe comprend on le sait des joueurs venus de Paris, ou de Strasbourg, ou de l’étranger. Mais plu- sieurs d’entre eux n’étant pas licenciés A, le FCS ne pouvait pas se présenter au complet.
Malgré cela, on supposait généralement qu’avec ses lozes, de James, Lovy, Boros, Wartel, etc… il pourrait venir facilement à bout du C.A. Mulhouse. Il y eut peut être excès de confiance. Et ce défaut fut aggravé par les circonstances atmosphériques.
En effet, pendant tout le match, un vent puissant soufflant en rafale dans le sens longitudinal du terrain, a été assez influent sur le résultat.
Les Mulhousiens eurent le choix du terrain et tout naturellement ils surent profiter du vent. Aussi toute la première mi-temps se déroula-t-elle à leur avantage. Et par trois fois, malgré les efforts d’un nouvel et excellent gardien de but Lovy, le FCS fut battu.
Cela était déjà surprenant mais acceptable, surtout que tous les spectateurs pensaient, qu’après le repos, les choses changeraient d’allure. Le vent se ralentit légèrement, mais l’ardeur des Mulhousiens parut plutôt s’accroître si bien que leur défense fut très efficace et leurs échappées dangereuses. Sur l’une de ces attaques rapides; le CAM réussit à marquer un quatrième but. Dès lors le match était joué. Le FCS démoralisé ne sut pas réagir et laissa les Alsaciens quitter le terrain avec une victoire très méritée.
M. le lieutenant Colas arbitrait ce match au cours duquel toute l’équipe du CAM a joué avec cœur tandis qu’au FCS seuls Wartel et le goal Lovy, ont joué comme il faut.
Regrettons, la disparition du FCS de la Coupe de France, mais souhaitons surtout que cet échec serve de leçon et démontre qu’il ne faut pas seulement quelques as pour vaincre la volonté et la cohésion d’une modeste équipe.
4 titulaires ne disposant pas de la licence A, il fut aligné l’équipe réserve renforcée par 3 joueurs de l’équipe première et Lozes joua avant centre, poste qu’il avait occupé quelques mois au Real Madrid. On rapporte aussi qu’il y avait des dissensions intestines dans le groupe causées notamment par Lozes et Dufour dont le comportement n’était pas exemplaire.
Il n’empêche que cette lourde défaite à domicile contre la 2ème équipe de Mulhouse représente la première grande désillusion du FC Sochaux.
La feuille de match
Stade de la Carrosserie 14H30
600 Spectateurs
Arbitre: Lieutenant Colas
FC Sochaux: Lowi ; Morrot, Degane ; Bregnard, Wartel, Varéchon; Ferrand, Boros, Lozes, Bailly et Besançon.
C.A Mulhouse: Furstenberger ; Schultzendorff I, Schultzendorff II; Grosser, Hofer, Polatzek; Schmitt, Nett, Ross, Barlement, Didierlaurent.
Buts C.A Mulhouse: Didierlaurent (2) 4’ ? Ross (2) ? 60’